François Fillon répète qu’il n’y a pas d’argent «à distribuer».
Nicolas Sarkozy a emporté en Chine ses devoirs de «président du pouvoir d’achat». Pendant son voyage, le président de la République a passé au tamis l’ensemble des propositions susceptibles d’être retenues pour donner un coup de fouet au pouvoir d’achat des Français. Le chef de l’État sait qu’il est astreint dans ce domaine à une obligation de résultats à court terme pour renflouer leur portefeuille sans alourdir la dette publique. La marge de manœuvre est étroite. D’autant qu’il est tenu par ses promesses de campagne, les engagements européens sur le déficit et la dette publique. Et qu’à l’Élysée, ses conseillers sont tiraillés entre volontarisme économique et orthodoxie budgétaire.
Attendu au tournant sur cette question ultrasensible, devenue la principale préoccupation des électeurs, Sarkozy a mis à contribution ministres et parlementaires. La chasse aux idées est ouverte mais elle est strictement encadrée. Le premier ministre François Fillon a déjà fixé le cap, en répétant qu’il n’y avait pas d’argent «à distribuer». Dans ce contexte de vaches maigres, un coup de pouce au smic, comme le réclament les socialistes, ou une augmentation générale des salaires semblent exclus. De même, l’idée d’un treizième mois défiscalisé, suggéré par certains conseillers de Sarkozy, ne serait plus d’actualité. Un ministre décrypte : «A l’Élysée, on cherche des mesures à effet immédiat et qui ne coûtent pas trop cher.»
Persuadés que cette question est le talon d’Achille de l’exécutif, les socialistes, qui défendront demain une proposition de loi sur le pouvoir d’achat, sont montés hier au créneau à l’Assemblée. «Depuis sept mois, la France qui se lève tôt, qui travaille dur et qui gagne peu, supporte tout l’effort», a lancé Jean-Marc Ayrault, le patron des députés PS. Dans sa réponse, François Fillon a surtout défendu la stratégie du gouvernement : «Nous travaillons à augmenter la croissance, nous travaillons à augmenter le travail des Français et alors le pouvoir d’achat des Français suivra.» Manière de reconnaître que le gouvernement n’a pas de baguette magique pour augmenter à court terme le pouvoir d’achat.
En attendant, les députés UMP phosphorent sur la question. Frédéric Lefebvre, très proche du chef de l’État, et Jérôme Chartier, porte-parole du groupe UMP sur le budget, ont été chargés hier par Jean-François Copé, patron des députés UMP, d’animer un groupe de travail sur le pouvoir d’achat. Objectif : «Recenser toutes les niches de pouvoir d’achat et faire le tri.» Frédéric Lefebvre pratique lui aussi l’ouverture, en vantant les mérites d’une proposition... socialiste visant à conditionner le versement des subventions compensatrices des 35 heures (qui coûtent 25 milliards d’euros par an à l’État) à l’ouverture et à l’aboutissement de négociations salariales dans les entreprises. Un système de «bonus malus» que Ségolène Royal avait défendu pendant la campagne présidentielle.
Le président de la commission des Affaires sociales Pierre Méhaignerie et le rapporteur général du budget Gilles Carrez souhaitent l’assouplissement et l’extension des heures supplémentaires défiscalisées, notamment pour pourvoir une partie des 400 000 offres d’emplois non satisfaites. «On a mal communiqué sur la défiscalisation des heures sup», reconnaît Yves Jego, le porte-parole de l’UMP.
Inflation de propositions
Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, pense que «la meilleure piste» est de généraliser le système d’intéressement à toutes les entreprises, de développer l’actionnariat salarié et la participation. Marc Daubresse préconise la baisse des charges sur le chauffage dans le parc locatif social, et le remboursement de prêts plafonnés pour l’accession populaire à la propriété. Alain Joyandet, lui-même chef d’entreprise, suggère de distribuer une prime annuelle de 1 000 euros aux salariés des PME-PMI, au titre du partage des profits, en exonération de charges patronales et salariales. Jérôme Chartier penche, lui, en faveur de mesures pour permettre la distribution de stock-options à tous les salariés dans les sociétés cotées. Autres pistes évoquées : l’extension du revenu social d’activité, actuellement expérimenté dans trente départements, la baisse du prix du gaz, de l’électricité, des abonnements à la téléphonie mobile, la hausse de la prime pour l’emploi ou encore la mise en œuvre d’un chèque transport pour les salariés, annoncé par le gouvernement Villepin, mais qui, selon Fillon, hier, n’est «pas une bonne réponse».
Face à cette inflation de propositions plus ou moins coûteuses, le villepiniste Hervé Mariton met en garde : «Évitons le concours Lépine ou la hotte du père Noël. Il faut gérer la question du pouvoir d’achat sur cinq ans.» Reste que Nicolas Sarkozy veut du concret. Le «président du pouvoir d’achat», qui voudrait pouvoir annoncer du «gros lourd», selon une confidence faite à un dirigeant UMP, a bel et bien créé une attente.
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