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Des croix gammées au Mémorial de la déportation de Drancy

Des croix gammées tracées à la peinture noire ont été découvertes samedi 11 avril au matin, en pleine Pâque juive, au Mémorial de la déportation à Drancy, lieu emblématique de la mémoire des déportés juifs de France. Les inscriptions ont été effacées peu après les constatations policières.

"Une croix gammée haute de 1,50 m a été peinte sur le wagon, une autre de 1 mètre de haut a été tracée sur la stèle, et une troisième a été tracée sur le mur d'un commerce à 500 mètres de là", a indiqué un porte-parole du ministère de l'intérieur.

Les inscriptions ont été réalisées entre 1 h 20 et 2 heures du matin par une personne d'une vingtaine d'années de type européen, selon les images enregistrées par les cameras de vidéosurveillance situées à proximité du site, a indiqué Jean-Christophe Lagarde (NC), député-maire de la ville.

"Cela fait très mal car le lieu était jusqu'à présent totalement respecté", avoue Lucien Tismander, représentant de l'Association Fonds Mémoire d'Auschwitz (Afma). "Ce monument est un peu le tombeau des 76 000 déportés de France et on l'a souillé", a-t-il ajouté. "Cet acte est d'autant plus grave qu'il touche un des lieux les plus symboliques de la mémoire de la Shoah en France", a souligné l'Union des étudiants juifs de France (UEJF).

Présent sur place, Hassan Chalghoumi, imam de Drancy, a voulu "montrer le soutien de la communauté musulmane envers la communauté juive et condamner la personne responsable, quelles que soient son origine, ses croyances et ses idées politiques". "Nous entretenons d'excellentes relations entre communautés à Drancy et nous voulons montrer qu'une telle ville, symbole de malheur dans le passé, peut devenir un exemple de tolérance", a-t-il ajouté.

Dans un communiqué, la ministre de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie, a condamné "avec la plus grande fermeté les inscriptions antisémites faites à Drancy" et assuré "que tous les moyens sont mis en oeuvre pour identifier les responsables de ces actes inqualifiables et les traduire en justice".

Entre août 1941 et août 1944, le camp de Drancy a été le principal lieu d'internement et de départ des déportés juifs de France vers les camps d'extermination nazis, pour la majorité des convois vers Auschwitz-Birkenau.

La police française mise en cause dans un rapport d'Amnesty

David Diaz-Jogeix, directeur adjoint du département Europe d'Amnesty International, a supervisé le rapport de l'ONG publié jeudi 2 avril et intitulé "France : Des policiers au-dessus des lois". Il explique que les forces de l'ordre se livrent de plus en plus à des "représailles" contre certaines victimes ou témoins de mauvais traitements qui leur sont imputés, notamment à travers des plaintes pour "outrage" ou "rébellion".


En 2005, le dernier rapport d'Amnesty sur le sujet dénonçait de graves violences policières, sous couvert d'un "climat d'impunité". Comment la situation a-t-elle évolué en quatre ans ?

La situation s'est détériorée depuis. Aucune des recommandations faites par Amnesty international lors du précédent rapport n'a été prise en compte par le gouvernement. Et ce manque d'action de sa part nous inquiète. En 2005, nous dénoncions certaines méthodes employées par la police qui pouvaient faire courir de graves dangers, jusqu'à l'homicide. En 2006, la Cour européenne des droits de l'homme a rendu un arrêt dans lequel elle a condamné la France et demandé qu'elle donne à ses fonctionnaires de police des instructions précises sur l'utilisation des méthodes de contrôle. Or début 2008, à Grasse, Abdelhakim Ajimi est mort après avoir été maîtrisé par des policiers lors de son arrestation : nous attendons toujours des précisions du ministère de l'intérieur sur ce drame. Dans ce rapport, nous recensons une quinzaine de cas, qui témoignent d'un problème structurel de violence policière, sous forme d'homicides, notamment mais aussi de coups, de mauvais traitement et d'injures à caractère raciste ou xénophobe.

Un phénomène retient votre attention, que vous qualifiez d'"inquiétant" : les personnes qui dénoncent des mauvais traitements de la part de la police peuvent se retrouver en position d'accusées.

Nous constatons une augmentation des poursuites sur la base de l'outrage ou de la rébellion à l'encontre des personnes qui protestent contre les mauvais traitements de la part des policiers, ou qui tentent d'intervenir après en avoir été témoins. Ces mesures de représailles sont une tendance qui nous préoccupe. De même, des personnes qui se sont plaintes de mauvais traitements auprès de la CNDS [commission nationale de déontologie de la sécurité] ont été poursuivies par les agents concernés pour dénonciation calomnieuse. Cela met une pression sur les victimes afin qu'elles ne portent pas plainte. Si nous connaissons les chiffres du ministère de l'intérieur sur les infractions d'outrage et de rébellion, nous ne savons pas combien de plaintes sont déposées pour mauvais traitement et quelles suites leur sont données, qu'il s'agisse d'une procédure disciplinaire ou pénale, avec éventuellement, au bout, une condamnation.

Lorsqu'une plainte est déposée contre un agent de la force publique, les mécanismes d'enquête vous apparaissent non conformes aux obligations internationales de la France. Quelles sont, selon vous, les lacunes et comment y remédier ?

La première lacune concerne le manque d'indépendance et d'impartialité. Certes, il n'y a pas de lien structurel entre le juge ou le procureur vis-à-vis de la police. Il n'en demeure pas moins que le juge d'intruction ou le procureur font appel à la police judiciaire pour des auditions de témoins, de suspects ou pour recueillir des éléments de preuve. Ce qui conduit à un manque d'indépendance de fait. De même, en cas de plainte contre les agents de la force publique, c'est la police qui mène l'enquête. Parfois, ce sont les agents du même service que ceux contre qui une plainte a été déposée qui enquêtent, au risque, là encore, d'un manque d'impartialité. La tendance que nous constatons est que les recherches menées par la police sur des policiers ne sont pas exhaustives : tous les témoignages ne sont pas nécessairement pris en compte et il n'y a pas forcément de recherche active d'autres éléments de preuve, comme des bandes vidéo ou des certificats médicaux. Ce qui fait que quand le dossier est présenté au procureur au terme de l'enquête préliminaire, ou au juge d'instruction, il n'y a pas suffisamment d'éléments pour poursuivre et on aboutit à un classement sans suite. Il s'agit là aussi d'une tendance claire. A tel point que bien souvent, les avocats l'anticipent et déconseillent au plaignant de poursuivre en justice. D'autant plus, qu'en cas de plainte contre des forces de police pour mauvais traitement, la procédure pénale est très lente.

Un élu FN met Jean Jaurès sur ses affiches de campagne aux européennes

Un portrait de Jean Jaurès orne les affiches de campagne d'un candidat du Front National aux élections européennes de juin, placardées à Carmaux (Tarn), fief du fondateur du Parti socialiste (à l'époque SFIO) en 1905, révèle jeudi le quotidien régional L'Indépendant.

Un portrait de Jean Jaurès orne les affiches de campagne d'un candidat du Front National aux élections européennes de juin, placardées à Carmaux (Tarn), fief du fondateur du Parti socialiste (à l'époque SFIO) en 1905, révèle jeudi le quotidien régional L'Indépendant.

Le portrait de Jaurès, orné d?une citation "A celui qui n?a plus rien, la Patrie est son seul bien !", est imprimé sur les affiches de campagne de Louis Aliot, avec un bandeau affirmant "Jaurès aurait voté Front National".

Conseiller municipal à Perpignan et conseiller régional Midi-Pyrénées, Louis Aliot est également secrétaire général du FN.

Il avait recueilli 10,42% des suffrages au second tour de l'élection municipale à Perpignan, annulée par la suite pour cause de "fraude à la chaussette" par le tribunal administratif de Montpellier.

La liste du maire UMP Jean-Paul Alduy avait obtenu 45,48% des suffrages exprimés, contre 44,11% pour la socialiste Jacqueline Amiel-Donat.

"Au moment où nombre de nos compatriotes commémorent cette année le centcinquantenaire de la naissance de Jean Jaurès (1859-1914), voilà une manière de rappeler qu?aujourd?hui, la seule formation politique en France à défendre les valeurs de justice sociale et d?humanisme est le Front National", affirme Louis Aliot sur son site internet.

Cette affiche n?est pas encore apposée sur tous les murs de la circonscription dans laquelle Louis Aliot est candidat, mais seulement à Carmaux où Jean-Luc Mélenchon, fondateur du Parti de gauche et tête de liste dans le Sud-Ouest, y a tenu un meeting la semaine dernière.

"Jean Jaurès est au Panthéon. C?est un personnage public qui appartient à la France et à tous ces citoyens", a estimé M. Aliot, cité par L'lndépendant, ajoutant que "Bruno Gollnisch dans l?Est et Marine Le Pen dans le Nord vont reprendre" la même affiche.

Le député-maire de Toulouse (PS) Pierre Cohen a dénoncé, mercredi dans un communiqué, une "nouvelle provocation" du Front National, soulignant que l'engagement pacifiste de Jean Jaurès "lui a valu les insultes et la haine des nationalistes, la famille politique de Louis Aliot".

"Cette campagne haineuse a armé la main de Villain qui l?a assassiné le 31 juillet 1914 à Paris", a ajouté M. Cohen.

André Barthélemy, membre de la Commission nationale consultative des droits de l'homme et président de l'ONG lyonnaise Agir ensemble pour les droits de l'homme (AEDH) a été condamné, jeudi 19 mars, à 1 500 euros d'amende par le tribunal correctionnel de Bobigny pour avoir protesté contre l'expulsion de deux Congolais. Alerté par les cris de deux passagers sans-papiers reconduits et escortés à bord d'un vol Air France Paris-Brazaville en avril 2008, M. Barthélemy aurait protesté contre les conditions de cette reconduite, incitant les autres passagers à la révolte, selon la police. Les magistrats l'ont reconnu coupable de "provocation directe à la rébellion" et d'"entrave volontaire à la navigation". Véronique Rouault, directrice d'AEDH, se dit "très surprise par la décision, qui manifeste un raidissement de la jurisprudence en la matière" et envisage de faire appel, a-t-elle confié au Monde.

Comment l'antisarkozysme progresse

L'antisarkozysme est de retour. Ce qui n'était encore qu'une réaction des milieux les plus militants et radicaux aux débuts de la présidence de Nicolas Sarkozy devient un sentiment plus répandu dans l'opinion. Alors qu'il peine à convaincre de la pertinence de son plan anticrise, le chef de l'Etat cristallise un mécontentement croissant.

Ce dernier s'exprime dans les grèves ouvrières contre les fermetures d'usines, mais aussi dans des catégories jusqu'ici relativement protégées : magistrats, avocats, médecins, enseignants, étudiants et cadres. "On assiste à une déception incontestable de l'électorat. Elle ne s'est pas encore transformée en désaffection. Mais la crise et la remontée du chômage ne peuvent que générer un mouvement social qui va se traduire par un antisarkozysme plus marqué", analyse Denis Pingaud, vice-président exécutif de l'institut Opinionway.

Le refus d'une société mise en fiches, déshumanisée et au service de l'argent roi, s'est élargi. Multiforme, la contestation va des altermondialistes aux Verts, en passant par les militants anti-OGM et les opposants à l'incarcération de Julien Coupat dans l'affaire des sabotages des lignes SNCF.

L'"Appel des appels" en est la traduction. Depuis son foyer d'origine (les milieux psychanalytiques), il a su fédérer une multitude de mécontentements via les collectifs "Non au fichier Edvige", "Pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans", "Sauvons l'hôpital public", "Sauvons les Rased" (réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté), "Sauvons la recherche", "Sauvons l'université"... L'initiative surfe sur les réformes tous azimuts voulues par M. Sarkozy.

"Le temps est venu, de coordonner ces différents mouvements et d'en tirer tout le sens politique", préviennent les signataires de ce manifeste qui a déjà conquis 71 000 personnes. L'un de ses initiateurs, Roland Gori, psychanalyste, souhaite, lors d'une réunion à Paris, le 22 mars, transformer la pétition en "cahier des charges, comme les cahiers de doléances de 1789" et constituer un front uni des protestations.

"CONVERGENCE DES LUTTES"

D'autres expériences militantes témoignent de ce changement de climat. Leila Chaibi, une des animatrices de "l'Appel et la pioche", collectif de jeunes précaires et salariés proches du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), assure que les actions de réquisition qu'elle organise dans des supermarchés attirent de plus en plus de monde. "Les gens sentent bien que le pouvoir se fout d'eux et qu'on peut repousser les limites de la désobéissance civile", explique-t-elle.

Le même écho provient des militants de Génération précaire, qui dénoncent les stages gratuits, ou de Jeudi noir dans le domaine du logement. "Les mauvaises réponses à la crise fédèrent contre Sarkozy, et le ras-le-bol monte", confirme Julien Bayou, qui participe à ces mouvements. Les politologues notent que Nicolas Sarkozy n'a plus le monopole du "mouvement" sur la scène politique, dont il disposait encore à l'automne 2008 malgré une popularité en baisse. L'aggravation de la crise économique et le sentiment que le plan de relance n'est pas à la hauteur ont changé la donne.

"La logique du mouvement perpétuel voulue par Sarkozy est arrivée à épuisement. Elle ne marche plus parce que le mouvement social a réussi à faire le lien entre des mobilisations aussi différentes que celle des enseignants-chercheurs, celle contre les licenciements dans l'automobile ou dans le secteur hospitalier", résume Vincent Tiberj, chercheur à l'Institut d'études politiques de Paris.

La montée de la contestation sociale, sectorielle, puis nationale avec l'entrée en scène des confédérations syndicales, a, semble-t-il, donné un sens au ressentiment anti-Sarkozy. La grande manifestation interprofessionnelle du 29 janvier en a été, à ce jour, l'expression la plus forte. "L'antisarkozysme fédérait tout", remarque Annick Coupé, porte-parole de Solidaires.

"Le 29, s'est exprimé le rejet du mépris ressenti de la part du président. Le slogan "tu l'as vu ma grève ?" en était le symbole", renchérit Jérome Fourquet, directeur de l'IFOP.

"C'est l'expression d'un anti-sarkozysme par le bas, d'un nouvel imaginaire politique inscrit dans le mouvement social", assure encore Stéphane Rozès, directeur général de l'institut CSA. Un climat dont profite la gauche radicale, M. Besancenot en tête. La victoire du Collectif LKP en Guadeloupe s'est inscrite dans ce paysage.

Le maître mot est désormais la "convergence des luttes". Prochain rendez-vous : le 19 mars, nouvelle journée de mobilisation interprofessionnelle.

Marc Dupuis et Sylvia Zappi
Article paru dans l'édition du 08.03.09.

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